On revient sur l’éditorial : Un « couple d’alcooliques à la dérive » disséqué par le tribunal de Quimper

Légitime défense ou non ? La question était, ce mardi 26 décembre, au cœur de l’une des audiences du tribunal correctionnel de Quimper. Sur le banc des accusés, un homme de 32 ans, des années d’errance derrière lui malgré son jeune âge, comparaissait devant les juges pour des faits de violence envers sa compagne. C’est elle, dans la nuit du 21 au 22 décembre, aux alentours de 4 h du matin, qui a alerté les forces de l’ordre : pieds nus et manifestement alcoolisée, la victime, âgée de 23 ans, a indiqué aux policiers du commissariat de Quimper avoir été la cible de coups de pied de la part du prévenu, avec qui elle entretient une relation depuis dix mois. Ce dernier lui aurait également tiré les cheveux avant de la traîner par la cheville en dehors du squat quimpérois dans lequel ils résident. Une version peu ou prou similaire à celle avancée devant les magistrats par le prévenu. À un point près : « C’est elle qui a été violente la première, affirme le jeune homme. Elle a voulu qu’on ait un rapport sexuel, ce que j’ai refusé. Après ça, elle a commencé à parler de ma mère décédée, puis elle m’a étranglé… C’est pour ça que j’ai été violent. » Ça, et la boisson : la nuit des faits, tous deux reconnaissent avoir consommé de l’alcool en grande quantité.

Pour le procureur, « un épisode de violence totalement illégitime »

« La seule façon de vous en sortir, c’est le justificatif de la légitime défense, note le juge Christophe Lepetitcorps. Mais cela ne justifierait pas de l’avoir traînée par la cheville hors du squat. Là, on n’est plus dans la réciprocité. » À la question du prévenu, qui lui demande comment il aurait dû réagir, le magistrat répond de façon catégorique : « La seule disposition qu’il aurait fallu prendre, c’est de ne plus entretenir de relation avec madame. Là, ce que je vois, c’est un couple d’alcooliques à la dérive. » De son côté, s’il reconnaît que des coups réciproques ont été échangés, pour le procureur, ces derniers n’exonèrent pas pour autant le jeune homme : « Je comprends qu’une partie des coups ont été inscrits dans un contexte de légitime défense. Néanmoins, alors qu’il n’était plus menacé, monsieur a traîné madame sur le sol pour l’expédier manu militari hors du squat. Cet épisode de violence est totalement illégitime. » Ce dernier a requis 18 mois d’emprisonnement dont six assortis d’un sursis probatoire. L’avocat de la défense, Me Lauret, plaide la relaxe pour légitime défense : « Les violences sur les hommes, ça existe. On en entend moins parler, mais c’est bien ce que monsieur a décrit. » Des arguments que n’ont pas retenus les magistrats qui ont condamné le prévenu à dix mois d’emprisonnement dont cinq mois avec sursis. Une peine assortie d’une obligation d’exercer une activité professionnelle, d’une obligation de soins et d’une interdiction d’entrer en contact avec sa compagne pendant deux ans.